PBK : Nous
sommes entourés d’objets de toute taille, de toute valeur, de toute origine.
Qu’ils aient été fabriqués artisanalement ou industriellement, leur évidence,
leur apparente nécessité et leur prolifération nous amène a nous
interroger : quel rapport entretenons-nous avec les objets ?
1ere idée : matérialité de l’objet et mode de
production.
Solide, maniable pourvu de
caractère propre. Les objets sont notre création, ils sont le résultat d’une réflexion
qui a pu mener au prototype puis a la série. Ils sont le fruit d’un travail qui
a engagé un choix de forme, un mode d’usinage. Un système de commercialisation
donnant à la matière première une valeur ajoutée. L’industrie produit et rend
accessible un nombre considérable d’objets.
Emblème de la société de consommation, il pose des problèmes de stockage, de
recyclage (que faire des objets inutiles, désuets, des objets cassés).
Le développement numérique nous
libère-t-il de cette invasion ? Jeux, livres, disques tendent à se
dématérialiser. Mais se phénomène nouveaux nous affranchit-il de l’objet ou
accroit-il au contraire notre besoin de posséder des objets concrets ?
Notre besoin de posséder des
objets concrets que nous prenons plaisir à voir, toucher, sentir.
2eme idée : Fonction des objets
La majorité des objets qui nous
entourent ont une fonction, une destination précise clairement identifiée. Utiles, ils étendent le pouvoir de l’homme et
facilitent la vie quotidienne. Fruits des innovations technologiques, ils
alimentent aussi le mythe du progrès constant de l’humanité. Cependant, les
objets ne semblent pas toujours répondre à besoin prédéfinit. S’agit-il pour
autant seulement de gadgets superflus auxquels nous sommes attachés sous
l’influence de stratégies commerciales.
Ne constatons-nous pas que
l’objet créer son usage au fur et a mesure que les utilisateurs inventent a
postériori des fonctions qui le rendent indispensable. (EX : GPS,
téléphone…) Comme c’est parfois le cas dans le domaine des nouvelles
technologies.
Les objets peuvent aussi être
détournés de leur destination initiale (matériels t utilisateurs) par tout un
chacun comme pour les artistes, les dimensions esthétiques ou ludiques occupent
alors la finalité première de l’objet.
A quelle fonction les objets
sont-ils assignables ?
La valeur d’u objet ne peut se
réduire à sa fonction ou au besoin qu’il satisfait. D’autres facteurs
interviennent : ergonomie, design, prestige lié à la qualité des
matériaux, à la marque, à la mode, à la dimension esthétique.
Cette valeur n’est pas toujours
mesurable, elle tient aussi au regard que les individus (en collectif ou
personnel) portent sur un objet, en raison d’un attachement sentimental ou
d’une relation particulière (objets sacrés, patrimoniaux, objets cultes d’une génération…)
Une telle valeur fait donc de
l’objet bien plus qu’une simple chose inanimée posé devant un sujet.
Comment l’appréhender ?
Dans quel cas pourrait-on parler de fétichisme ou de liens irrationnels
engendrés de nos désirs et nos frustrations accumulées tout au long d’une
vie ; collectionner avec passion, entasser avec indifférence. Que disent
les objets de ceux qui les possèdent ? De quoi sont-ils le signe ? Et
aussi, que dit leur absence ? Est-elle signe de pauvreté, de dépouillement
ou de liberté, de vieillesse ?
« Le souci de paraitre et
des apparences imprègnent notre société occidentale contemporaine .il
suffit par exemple de longer les rayons des marchands de journaux pour
constater combien la presse s’est emparée de la question magazines de mode,
d’esthétique, de body building, de décoration. Les pages de couverture,
désormais saisonnière de la presse d’actualité, font désormais la promotion de
nos modes de paraitre » Isabelle Paresys
Ces propos informent d’emblée
sur la manière dont tout objet, au-delà de sa fonction précise clairement
identifiable s’inscrit dans un système de signe imprégnés de sociale. En se
sens, en anticipant à la recherche d’une identité, l’objet dessine le moi
sociale. Choisir un vêtement, changer de look, introduisent une mise en scène
de l’intimité, une représentation de soi.
Les mondains, les punks, ou les rappeurs
se reconnaissent entre eux pas le port de l’habit, par une certaine apparence
vestimentaire : à travers cette mise en scène de notre corps, nous donnons
à lire un style, un personnage, une représentation de nous même. C’est ainsi
que Roland Barthes (Le Système Du Vêtement -1967) c’est intéressé à la
sémantique du vêtement. De fait, si les vêtements sont des indicateurs de
l’origine sociale et du statut économique, ils sont conséquemment producteurs
de simulacres. La première page du roman de Maupassant « Bel-Ami »
est à se titre célèbre par tout un jeu subtile de mise en scène de soi et de
séduction qui brouillent les repères identificateurs, le héro cherche à
« porter beau », à paraitre plus qu’il n’est. Nous découvrons ainsi
une société où tout est fait pour se montrer au regard de l’autre.
Les téléphones mobiles : objets du paraitre.
Plus près de nous,
particulièrement dans un contexte de crise des identités, les objets
communiquant sont au cœur de la compréhension des mutations sociales actuelles
et des nouvelles pratiques de mise en spectacle de notre société : c’est ainsi
que le téléphone portale à non seulement modifié les interactions entre les
individus, les groupes et leurs pratiques de communication mais entrainer conséquemment
une réflexion originale sur l’identité individuelle et l’étude de la notion de
soi. De fait, le mobile ne met pas seulement en jeu une conduite conversationnelle
ou des formes d’interaction et d’être ensemble de par sa composante
émotionnelle forte, il participe à une sorte d’investissement affectif du
sujet. Il est devenu l’indice d’une appartenance symbolique à de nouvelles
valeurs et à de nouveaux modes d’autoreprésentation de soi qu’il est intéressant
d’étudier.
L’écrivain Umberto Eco
stigmatise se désir de paraitre qui gagne parfois les possesseurs d’un objet
communiquant pour sursignifier narcissiquement leur présence au monde :
prestige, représentation de soi et mise en scène de soi pour devenir vraiment
soi aux yeux des autres sont en effet au centre de cette extériorisation
ostensible des pratiques de communication ou le processus fait plus que le
message lui-même. Ainsi, la dimension figurative participe d’une relation
dramatisée à l’objet en fonction de l’expérience de la personne et en fonction
de ses groupes d’appartenance comme nous le voyons. Ce que le téléphone
portable donne à voir à travers un vecteur concret c’est la manière dont il a bouleversé
notre rapport à nous même et à autrui à la fois rapport d’identification et de
différenciation.
Comme marqueur central d’un
territoire qui fonctionne par projection de la sphère personnelle (notre
personne au centre de l’attention des autres, et dont notre voix et notre
gestuelle constitue les limites approximatives), le téléphone portable est donc
un outil de mise en scène de soi, un accessoire de notre présence, un objet
transitoire (que l‘on cherche à remettre inlassablement au gout du jour en changeant
de mobile)posé comme affirmation de soi et de nos valeurs : se montrer,
avoir une nouvelle apparence, devenir enfin soi dans un monde où notre rapport
au monde est profondément remis en question par la massification et l’anonymat
croissant.
Une anecdote de chercheurs
en communication : « Le spectacle connu de tous de personnes seules aux
terrasses de cafés est de se point de vue particulièrement instructif. Dans un
café du quartier Latin, un quartier chic et jeune de Paris, un jour de semaine
du mois de juin, des hommes mais surtout des femmes, souvent seuls sont comme
en situation d’attente (de quelqu’un, de la commande…). La situation est
ordonnée selon deux temps : avant la commande et pendant la consommation,
l’usage du téléphone est à la fois suspendu à ce rythme et donne un contenu à cet
espace-temps singulier. Une femme s’assoit et procède à une sorte de rituel
d’installation à table : elle enlève sa veste, sort ses clés de ses poche
pour les poser sur la table puis ouvre son sac à main et en sort ses
accessoires. En premier lieu, le téléphone puis son paquet de cigarettes. Elle
ne téléphone pas et ne reçoit pas d’appels mais elle manipule son mobile. Cela constitue
même l’essentiel de ses gestes. Elle le regarde, actionne des touches, le
repose, le reprend. Le serveur arrive et passe la commande, le téléphone est
alors semble-t-il momentanément oublié. Aussitôt la commande passée,
l’essentiel des gestes concerne à nouveaux e mobile qui redevient l’objet de
nombreuses manipulations. La commande arrive, et un rythme s’instaure entre
l’action de boire l’action de regarder alentour, et l’action de toucher son
téléphone. En un sens, face à notre solitude, subit et négative, le smartphone
entraine l’humanisation de la machine : il devient un autre soi-même,
l’avatar, la prothèse de notre moi défaillant puisque nous y projetons une
trace passagère et mouvante de nous même. Si l’objet incarnait autrefois
l’identité intangible (ne peut pas bouger, ne change pas) de la personne a
contrario l’objet communiquant forcément éphémère et relatif devient un autre
soi-même dans un monde conforme à l’affirmation de Baudelaire : « La
modernité c’est le transitoire, le fugitif, le contingent.
On peut aussi lire
Montanari (Federico de son prénom) : à travers l’exemple du téléphone
portale, l’auteur montre combien les objets communiquant en tant qu’objets
neo-magiques investis de pouvoirs vont entrainer de nouvelles dynamiques
sociales et symboliques. Comme artéfact technologique, le téléphone portable
alimente ainsi notre désir de manipulation du réel, notre ambition de jouer à
Dieu.
Autre réflexion : Objet rassurant, euphorisants,
narcissiques, le smartphone serait-il devenu la peluche des adultes
De fait, à l’instar de la mère
ou du doudou dans la prime enfance, le portable pourrait être considéré comme
l’objet transitionnel des grands. Inventé par Donald Winnicott (pédiatre et
psychanalyste), le concept d’objet
transitionnel s’applique à un objet auquel l’enfant s’attache particulièrement
comme un petit ours, une poupée de chiffon, un morceau de tissu. Cet objet est
emporté dans tous les déplacements, il aune fonction de sécurisation, de
facilité pour l’endormissement, quand l’enfant ne retrouve pas cet objet
électif, il est perdu, inconsolable.
1ère idée : objet transitionnel,
objet obsessionnel
A ce titre, le téléphone
portable, parce qu’il est souvent investi d’un lien affectif très fort, n’est
pas sans rappeler cette fonction d’objet transitionnel. Florence Odin et
Christian Thuderoz écrivent : « Le portable permettent à la fois de
réaliser le rêve d’ubiquité (don d’être à plusieurs endroits en même
temps), de s’affranchir des frontières
géographiques et d’être affectivement porche d’un tiers distant. Quant aux
fonctions ludiques, elles permettent à l’individu de l’occuper, de le
distraire, l’amuser lorsqu’il est seul. Comme un doudou régressif ou un cordon
ombilical qui permet d’échapper à la peur de la solitude. Tu as la radio, la
télé, le lecteur MP3 et les jeux intégrés ; snapchat, twitter, insta,
facebook… C’est comme un coffre à jouet pour ne plus jamais être seul ;
c’est magique comme la poupée qui parlait qu’on avait dans note enfance.
Dernière idée : le monde dans la main.
Mais si le smartphone est un
médiateur avec le monde extérieur, il amène également, comme beaucoup d’objets
numériques à le rapetisser et ainsi à s’en protéger en le condensant
fantasmatiquement aux dimensions d’un écran qu’on tient dans la main.
ð
Le monde est résumé,
condensé dans l’écran
Ce dérèglement des systèmes de
repérage du réel entrainé par les objets connectés ne risque-t-il pas
d’entrainer une perte dans le lien à soi-même et aux autres. Métaphore d’un
cordon ombilicale rassurant, substitue de l’omnipotence maternelle archaïque
ð
Ce qui replace la
toute puissance de sa mère.
Le smartphone constituerait
ainsi un refuge qui, paradoxalement nous isole d’autant plus du monde qu’il
nous en rapproche illusoirement.
ð
Plus on passe de
temps sur le smartphone plus on croit être en contact avec le monde mais faux
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